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  • Marie-Michelle DESCHAMPS
du 26 octobre au 23 novembre 2013

Dans La chambre double, Marie-Michelle Deschamps utilise la métaphore de l’hôtel afin de décrire le fonctionnement du langage. D’une halte à l’autre, le lecteur accompagne avec un étonnement médusé ce parcours savamment déployé. Et il ne peut qu’acquiescer à ce manifeste, démonstration subtile qui pourtant n’a rien de programmatique. Il s’agit avant tout de mettre en relation les mots et les choses, de donner à voir entre les lignes du texte le langage comme expérience.

Projet d’autant plus séduisant que le langage, en soi, est déjà une métaphore du réel auquel il renvoie de façon distanciée. Cette propriété métaphorique du langage, Édouard Glissant l’a nommée opacité, signifiant par là ce qui, dans le discours et dans la culture, résiste à la transparence et à l’univocité du sens. Ce qui se laisse appréhender par un partage procédant de l’émotion et de l’écoute davantage que de la raison. Ce qui procède de la diversalité du monde et se décline dans le détail infime aussi bien que dans la fresque plus bavarde.

L’art participe de cette capacité de « dire sans dire tout en le disant » que Glissant attribue à certains écrivains. Comme le langage, l’art est métaphore. L’artiste transpose, traduit, voire trahit le réel. À ce titre, il procède par citations et fragments. Ainsi du travail de Marie-Michelle Deschamps qui a partie liée avec le langage et l’écriture. Le récit est là, en écho au texte-manifeste auquel il renvoie.

S’il fallait décrire par une nouvelle métaphore l’exploration à laquelle nous convie l’artiste, je suggère celle du livre – palimpseste dans lequel certaines pages effacées par l’usure du temps auraient été réécrites avec patience, Marie-Michelle Deschamps proposant à travers ses oeuvres les composantes d’une trame à la texture à la fois rigoureuse et énigmatique.

Lise Gauvin


Née à Montréal en 1980, Marie-Michelle Deschamps, vit et travaille à Montréal et à Glasgow au Royaume-Uni où elle a obtenu une Maîtrise en arts visuels à la Glasgow School of Art en 2012. Combinant sculptures, dessins, installations, médias d’impressionet livres d’artiste, son travail s’articule souvent autour d’élément textuels ou de langage. Détentrice de bourses du CALQ et du CAC, son travail a été récemment présenté à la Sunday Art Fair, Londres, Royaume-Uni avec la Galerie Gregor Staiger, Zurich (2013). Ses expositions récentes comprennent: Valise, BQ, Berlin (2013), Allemagne; Routine Investigations, un duo avec Justin Stephens au Centre For Contemporary Arts, Glasgow (2013); Standard, David Dale Gallery, Glasgow (2013); Master Readings and S, M, L, Espace Saint-Valentin, Lausanne, Suisse (2013); Don’t leave me this way, Kunstlerhaus Bethanien, Berlin (2012); Life-Size / Grandeur Nature, articule, Montréal, (2011). En 2014, Deschamps présentera son travail à la Collective Gallery, Édimbourg, lors du Edinburgh Art Festival et des jeux du Commonwealth et elle sera en résidence à Studio Voltaire, Londres en Novembre 2013.

Essayiste, critique et nouvelliste, Lise Gauvin a publié plusieurs ouvrages consacrés à la littérature québécoise et aux littératures francophones. Ses récentes publications sont Parti pris littéraire (réédition, PUM, 2013), D’un monde l’autre. Tracées des littératures francophones (Mémoire d’encrier, 2013), Aventuriers et sédentaires. Parcours du roman québécois (Paris, Honoré Champion,2012). Entre 1991 et 2009, Lise Gauvin réalisait plusieurs entretiens avec l’exceptionnel Édouard Glissant. De ces échanges, six textes sont nés, recueillis dans L’Imaginaire des langues, essai paru en 2010 chez Gallimard.

Site de Marie-Michelle Deschamps