Entre-temps
- Guillaume LACHAPELLE
Deuxième interprétation d’un ensemble d’œuvres réalisées et présentées à Berlin cette année, entre-temps propose des compositions dans lesquelles des motifs du quotidien sont reproduits et combinés de façon insolite. De petits univers donnent une impression de lieux, tel des fragments de mémoire dont les formes ont dérivé. Décors d’une narration sous-entendue et recomposable, ils entrent en dialogue avec le spectateur et l’invitent à leur attribuer une histoire.
Des architectures urbaines, essentiellement faites d’échafaudages, se veulent une évocation d’un état transitoire des lieux, d’une ville en continuelle reconstruction et en réinterprétation d’elle même. Combinés à ces structures, des objets y créent d’autres relations; des tourniquets par exemple, dans des arrangements plus ou moins logiques, rappellent les frontières et les déplacements entre les lieux, tandis que d’autres constructions s’animent et s’articulent dans des activités nouvelles, voire deviennent organiques. Des éléments de plomberie exagérés définissent une pièce, inscrivent un individu dans une relation symbiotique avec cet environnement. Ce sont quelques codes visuels, à la fois précis dans leur rendu, mais détournés de leurs fonctions qui réfèrent à un espace souvent sans le monter lui même, qui créent une impression de familiarité et d’étrangeté à la fois.
Le livre de livres présente un seuil. Lieu transitoire, de contact entre deux mondes, une ouverture se prolonge vers un abîme où l’avancée dans la connaissance devient un parcours dans l’obscurité. Le livre est à la fois contenant et contenu dans une continuité qu’on suppose perpétuelle, maintenant hors de portée un hypothétique contenu réel. Comme une quête de savoir non aboutie et probablement impossible, il traduit un questionnement sur les limites de la connaissance et l’impossibilité de répondre aux interrogations fondamentales, de prendre appui sur quelque chose de réel.
Cette série d’œuvres s’inscrit dans le cadre d’un projet d’expérimentations basé sur la modélisation 3D et les procédés de prototypage rapide. Il s’agit pour moi d’un mode de production qui permet une nouvelle approche formelle. La précision particulière et le degré de détail de même qu’un aspect parfois froid et industriel porte à la simulation. Le rendu permet de jouer sur le potentiel et l’éventualité de réalité contenue dans l’esthétique de la maquette. La facilité de remanier et transformer indéfiniment un objet modélisé en 3D donne aussi lieu à une esthétique de répétition, de variations et d’hybridations.
Guillaume Lachapelle
Guillaume Lachapelle vit et travaille à Montréal. Il est diplômé en arts visuels de l’UQAM. Sa pratique est essentiellement sculpturale et se décline sous forme d’installations et de maquettes. Il a récemment exposé au Künstlerhaus Bethanien à Berlin dans le cadre d’une résidence d’artiste. Il a également présenté son travail à la galerie Edward Day à Toronto, au centre d’exposition Circa, ainsi qu’à la galerie Art Mûr, à Montréal. Il a aussi participé à des expositions de groupe en France et au musée de Rimouski. Il collabore à des films, à des productions télévisuelles et théâtrales en tant qu’accessoiriste et réalisateur de décors.
Son travail prend la forme de métaphores développées autour de motifs familiers. Transformés et recomposés dans de micro-univers fantastiques, les éléments et objets qu’elles représentent deviennent une expression d’états d’être et révèlent les dessous inquiétants du quotidien. Elles illustrent d’une façon ironique un rapport au monde complexe et une tension entre attentes et déceptions qui contraste avec leur aspect au premier abord ludique. Sa production récente s’oriente vers la modélisation 3D et des procédés de prototypage rapide ce qui donne lieu à de nouvelles explorations formelles.